Pourquoi la productivité classique mène à la déchéance
L’approche de la productivité qui est présentée « normale » dans notre culture ne l’est en réalité pas du tout. Elle est l'un des restes les plus toxiques de la civilisation romaine, que l'on a malheureusement conservé.
Elle peut mener à la ruine, au désespoir et à la déchéance totale :
À chaque fois qu'elle est appliquée à grande échelle, elle déclenche une « épidémie » de perte de sens, de problèmes de santé mentale, et de désespoir.
C'est l'une des pires choses que les Romains nous ont transmises, et on l’a pourtant gardée jusqu'à aujourd'hui… alors que c’est l'un des facteurs qui avait produit le déclin et la chute de leur propre civilisation.
Image : le déclin de l'Empire Romain, favorisé par l'approche classique de la productivité.
Je m’explique :
Les Romains utilisaient une sous-traitance gratuite et massive, par le biais de l’esclavage, pour construire toutes sortes de bâtiments monumentaux, de routes, d’infrastructures et de palais :
Et quand ils manquaient de main-d’œuvre, ils allaient conquérir quelques terres supplémentaires, pour récupérer quelques milliers de barbares en plus, les enchaîner, et les faire travailler sur la construction de nouveaux projets.
C’était un modèle qui consistait à maximaliser l’oisiveté et le plaisir pour les Romains eux-mêmes (et ça s’est fini comme on le sait, dans la décadence et la déchéance la plus complète), en se reposant sur une sous-traitance massive (et non rémunérée).
Notre civilisation est partie de là. Les penseurs qu’on étudie à l’école sont, en grande partie, issus de cette culture-là.
Nos rois, nos poètes, nos peintres et nos metteurs en scène se sont inspirés de ce que faisaient les Romains, comme si c’était le modèle ultime, la perfection qu’il fallait viser.
Et encore plus tard, lors de la Révolution Industrielle, on a encore reproduit le même schéma qui repose sur l'utilisation de la sous-traitance massive (cette fois-ci, rémunérée, mais avec juste de quoi survivre dans des conditions indécentes).
Le modèle était identique : maximaliser l’oisiveté pour ceux qui « réussissent », par le biais de la sous-traitance, en faisant travailler comme des chiens ceux qui n’ont pas « réussi ».
Image : des enfants au travail, pendant la Révolution Industrielle.
Et à chaque fois, tout comme lors du déclin de l’Empire romain, ça se termine de la même manière : dans la décadence et le désespoir.
Image : pendant la Révolution Industrielle, l'oisiveté avait généré une « épidémie » de perte de sens et de problèmes de santé mentale dans les villes. C'était le thème de beaucoup de créations artistiques de l'époque.
C’est inévitable parce que l’oisiveté mène directement à la déchéance.
En France et en Europe, à la suite de l'apogée de l'époque classique (qui avait tout copié ou presque des Romains), une décadence, une perte de sens et un déclin inévitables se sont manifestés exactement de la même manière :
Et ça a été l'une des causes de la Révolution Française.
Le problème, c’est que ce schéma est tellement inscrit dans notre culture qu’il nous semble normal, naturel, voire inné :
Le but de la vie, pour beaucoup de gens et en particulier pour les entrepreneurs, c’est de parvenir à terme à maximaliser leur oisiveté, c’est-à-dire à ne rien faire. À devenir rentiers, à vivre de revenus passifs, à boire des cocktails sur une plage pendant que leur activité tourne toute seule...
Et, comme les Romains, ils finissent souvent dans la déchéance quand ils y parviennent, parce que quand on est oisif, on détruit son équilibre vital.
L’approche romaine du travail est une machine à générer des carences, à la fois dans la société, et pour les personnes elles-mêmes. Elle est une machine à détruire l’équilibre des vies individuelles comme des groupes.
Et pourtant, de façon souvent inconsciente, elle reste le modèle dont s’inspirent la plupart d’entre nous, parce qu’ils ne savent pas qu’il en existe d’autres qui sont beaucoup plus sains.
Dans une période où tout partait en vrille, sur les ruines encore fumantes de ce qu’il restait de l’Empire romain, un homme au nom de Benoît est né dans la petite ville de Nursie, en Italie, aux alentours de l’an 500.
Issu d’une famille de nobles, il a été l’un des seuls à comprendre la vraie cause du malheur des gens de son époque et du déclin de la civilisation dans laquelle il était né.
Et il a organisé un système de vie communautaire, dans lequel le travail était honoré, et retrouvait sa place dans le cadre d’un mode de vie sain, complet et équilibré.
Dans ce système de vie, il n’y avait pas de hiérarchie entre les tâches, parce qu’elles faisaient toutes partie d’une vie saine. Le chef de la communauté lui-même (élu par les membres) s’adonnait au travail manuel, comme tous ceux qui en étaient physiquement capables.
Dans ce système de vie, le travail n’était pas pour autant quelque chose qui était vu comme un objectif ultime, mais au contraire, comme une activité qui complétait harmonieusement le reste des occupations d’une journée et qui participait à un équilibre.
Dans ce système de vie, l’aspect communautaire, le silence, le repos, le recueillement, l’étude et le travail étaient mis sur un pied d’égalité, et faisaient partie d’un tout.
C’était un système de vie sain, humain, propice à l’émergence d’un bonheur profond, qui permettait une existence stable, heureuse et accomplie, en contraste total avec la décadence de l’époque, conséquence de l’échec du modèle romain.
À l’époque de Benoît de Nursie, les communautés de vie étaient quasiment toujours monastiques. Lui-même n’était pas un prêtre, mais la communauté qu’il a fondée était une communauté de moines.
Sa sœur, Scholastique, a aussi fondé le même type de communauté pour des femmes (le monastère de Piumarola).
Et plus tard, au 11e siècle, ce mode de vie communautaire a été ouvert aux laïcs, qui pouvaient rejoindre un groupe de ce type sans faire de vœux monastiques, et donc en restant des « civils ».
Le mouvement démarré par Benoît de Nursie a donné lieu à toutes sortes de règles de vie différentes au cours des âges (dont celle des trappistes, par exemple), qui s’inspiraient toujours des mêmes principes, et qui visaient le même type d’équilibre.
Ce qui est étonnant, c’est qu’en travaillant souvent moins de quatre heures par jour, sans recourir à la sous-traitance massive, en œuvrant lentement, et surtout, sans faire du travail l’essentiel de leur vie (mais en le considérant comme un complément), ces communautés ont développé des business florissants, qui ont parfois eu une durabilité de plus de DIX SIÈCLES…
La brasserie de Weihenstephan, en Allemagne actuelle, a été fondée en 1040 par des moines qui suivaient la règle de vie établie par Benoît de Nursie. Elle fonctionne encore aujourd’hui, même si elle appartient aujourd’hui à l’État allemand.
La brasserie de Weltenburg, toujours en Allemagne, a été fondée en 1050, toujours par des bénédictins. Elle existe encore, et c’est toujours une communauté du même type qui s’en occupe :
Et le monastère du Mont Cassin (la communauté initiale créée par Benoît de Nursie) fait tourner elle aussi une activité commerciale (produits d’artisanat variés, qui ont évolué au fil des siècles) depuis… l’an 529 !
En matière de stabilité et de durabilité d’un business, il n’existe aucun équivalent dans l’histoire humaine.
Je recommande d'ailleurs la lecture d’un livre fascinant, écrit par le PDG d’une entreprise classique, qui a découvert un peu par hasard cette façon alternative d’aborder le travail, et qui a poussé son enquête jusqu’à en faire un livre qui s’appelle Business Secrets of the Trappist Monks.
On n’a pas tous pour projet de vivre comme un moine, bien entendu. Et on n'a pas non plus forcément les mêmes croyances qu'eux, ni même de croyances du tout.
Pourtant, les principes de vie établis il y a bien longtemps par Benoît de Nursie ont fait leurs preuves au fil des siècles, c’est le moins qu’on puisse dire.
Et l’histoire de ces communautés nous montre, de façon indéniable, qu’on peut faire tourner une activité florissante tout en travaillant peu mais en trouvant de la valeur dans le travail et dans l'effort, en ayant une vie équilibrée et une approche saine du business.
Elle nous montre aussi que cet équilibre permet une durabilité qu’aucune autre approche n’a fournie dans l’histoire humaine.
Comme beaucoup d’entrepreneurs, j’ai cru, au début de mon aventure, que le but de la vie était de développer un business qui puisse tourner sans moi. J’avais lu La semaine de 4 heures et tous les livres du type. L’oisiveté était mon but ultime, et la sous-traitance ou l’automatisation, le moyen d’y parvenir.
Je pensais encore comme un Romain… Jusqu’à ce que je vive moi-même une période de déchéance, qui est l’issue inévitable de ce genre de quête.
Depuis que je vis à la campagne, je me suis mis au travail manuel. Les tâches de tous les jours, l’entretien de mon terrain et de ma ferme, le soin des animaux… tout ça a rétabli un équilibre que j’avais perdu, et a nourri ma pratique créative de façon étonnante.
L’intégration de moments de silence, de contemplation de la nature et de méditation font aussi partie de mon quotidien et de ce nouvel équilibre.
Et j’ai retrouvé le bonheur que la déchéance m’avait fait perdre, je réussis à créer de façon beaucoup plus régulière que jamais dans mon passé — mais sans devoir me forcer ni me « motiver » —, j’ai beaucoup plus d’idées qu’avant - et elles viennent beaucoup plus naturellement —, et enfin, la rumination de pensées anxieuses qui m’avait oppressée pendant des années a enfin disparu.
Tout ça, grâce à la construction, brique par brique, d’un équilibre de vie. Parce que c’est en compensant ses carences qu’on parvient à créer facilement et à vivre une belle vie au quotidien, et pas en se forçant ni en luttant contre soi-même (parce que si on maximalise une partie de sa vie au détriment d’une autre, on se retrouve forcément avec des carences extrêmes, et il y a toujours un prix à payer ensuite).
J’ai beaucoup travaillé sur ma routine pour construire cet équilibre. J’ai fait plusieurs centaines d’expériences sur moi-même au fil des mois et des années.
Je me suis inspiré à la fois de l'approche de Benoît de Nursie, mais aussi de travaux scientifiques, de l’étude des routines de centaines d’auteurs, d’artistes et de créatifs…
Et j’ai créé une règle de vie moderne, utilisable en ville comme à la campagne, qui est destinée aux créateurs et aux entrepreneurs qui réalisent que l’approche classique du travail est en train de les détruire à petit feu, et qui veulent retrouver l’équilibre.
Cette règle de vie, c’est un framework, un « système d’exploitation », conçu pour vivre une belle journée chaque jour, à la fois fructueuse sur le plan du travail et de la créativité, heureuse, profonde, stable et apaisée.
En d’autres termes, cette organisation est conçue pour pouvoir vivre des journées dans lesquelles ni le corps ni l’esprit ne manquent de rien parce qu’on n’a plus de carences à compenser. Des journées détendues et équilibrées qui donnent la fierté d’avoir accompli un beau travail à chaque fois.
Et comme une vie réussie n’est pas autre chose qu’une journée réussie après une autre, et ainsi de suite… lorsqu'on a trouvé comment réussir une journée-type, on peut prétendre à réussir sa vie sans attendre, sans viser une ligne d’arrivée lointaine et hypothétique, et sans sacrifier le présent pour le futur.
J’enseigne cette approche aux modules suivants de la formation complète « L'Art de la Performance Tranquille » :
Activité physique et travail manuel : piliers de la créativité
Module 3 de la formation L'Art de la Performance Tranquille
(Module vidéo de 29 minutes)
Transforme ton rapport aux tâches parfois ingrates du quotidien : au lieu de les voir comme une perte de temps, fais-en des occasions d'apprentissage, de découverte et de maturation créative !
Utilise ces moments pour écouter des contenus de fond et faire avancer tes idées, et apprends à construire une nouvelle routine quotidienne qui inclut une activité physique régulière, pour ancrer ta pratique créative dans le réel.
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L'art de la création profonde : une routine compatible avec toutes les humeurs
Module 2 de la formation L'Art de la Performance Tranquille
(Module vidéo de 39 minutes)
Apprends à structurer tes séances de création autour d'étapes clés : d'abord l'apaisement de l'esprit, puis l'échauffement par l'écriture libre, puis la préparation intuitive, suivie de la période de création pure.
Tu vas apprendre à construire une pratique de création quotidienne, durable et apaisée, compatible avec toutes les humeurs, qui permet de donner le meilleur de toi-même de façon extrêmement régulière.
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Prendre du recul et faire mûrir ses idées avec une pratique silencieuse
Module 7 de la formation L'Art de la Performance Tranquille
(Module vidéo de 33 minutes)
Découvre des techniques concrètes pour apaiser le chaos intérieur et la rumination, accéder à une profondeur créative insoupçonnée en te connectant à ton intelligence profonde et faire mûrir tes idées.
Trouve une approche qui te convient, du silence pur à la marche méditative, et ritualise des moments de silence le matin et le soir pour initier et faire le point sur chaque journée. Prends des temps de solitude hebdomadaire et pars en retraite créative une fois par trimestre ou par an pour faire un travail de fond. Et apprends à transformer ces temps d'intimité avec toi-même en un outil de développement créatif extrêmement puissant.
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Développer sa personne et son positionnement au quotidien
Module 8 de la formation L'Art de la Performance Tranquille
(Module vidéo de 22 minutes)
Découvre comment créer un positionnement unique et hautement différenciant en fusionnant tes intérêts personnels et professionnels.
Il s'agit de puiser dans tes centres d'intérêt personnels pour créer des contenus uniques, inspirants et différenciants, qui sont nourris par ton cheminement personnel.
Découvre comment maintenir un équilibre entre tes centres d'intérêts personnels et professionnels pour insuffler régulièrement des idées nouvelles à tes contenus et développer à la fois ta personne et ta marque, dans une grande quête à laquelle tu peux dédier ta vie, et qui lui donne un sens.
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